“ Le vainqueur de Castiglione eût pu laisser un nom cher à la France ; mais elle réprouvera la mémoire du défectionnaire de Lyon ”

     Napoleon
Emblème Aigle Impérial

Charles Pierre François Augereau, né en 1757 à Paris et mort le 12 juin 1816 à La Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne), Maréchal d’Empire, duc de Castiglione.

 

Jeunesse

Issu d’une famille modeste, son père Pierre Augereau,ouvrier maçon,était compagnon du Tour de France,il vint à Paris ou il exerça un emploi de domestique.Il fit la connaissance de Marie-Josèphe Kresline,fruitière,blonde allemande qu’il épousa.Le jeune Charles Pierre François naquis le 21 octobre 1757, rue Mouffetard dans le quartier populaire de Saint-Médard.Sa mère mourut jeune.Son père se remaria,deux ans plus tard avec une jeune femme,qui fut pour Pierre une seconde mère:il ne l’oublira pas et lui témoignera toujours sa reconnaissance.Elle engagea son mari à faire donner à l’enfant des leçons  d’escrime, de tir et d’équitation,le jeune homme excella dans ces trois diciplines.Il deviendra un escrimeur hors-pair,un tireur d’une surprenante précision et un magnifique cavalier.Garçon turbulent,il devient travailleur,il étudie pour s’instruire,séduisant et beaux parleurs.Il aime se vanter,il restera d’ailleurs toujours un vantard.Ce caractère léger d’apparence,n’empèche pas qu’il ait bon cœur et qu’il soit généreux,serviable et fidèle dans ses amitiés.

L’exil

A dix-sept ans, Pierre Augereau s’engage au régiment de Clare-Irlandais. Il se trouve mal à l’aise parmi ces irlandais ; il aimerait rentrer dans la cavalerie. Grâce à son oncle, qui est employé dans les bureaux de Monsieur, frère du Roi, il est admis au régiment des dragons du duc de Damas ; c’est là qu’il fera le rude apprentissage de la vie militaire. Il passe ensuite, en 1775, dans les dragons d’Artois. En 1777, dans des circonstances mal connues, Augerau entre au service du roi de Prusse et participe, sous ses armes, à la campagne contre l’Autriche, puis contre la Turquie, dans le régiment de Bevern-Brunswick. Pendant son séjour en Allemagne, Augerau tiendra une salle d’armes à Dresde.

 

Après un retour en France, il s’expatrie de nouveau pour se rendre dans le royaume de Naples où il entre, comme instructeur, dans l’armée napolitaine, pour passer bientôt sous-lieutenant. Il reprend son activité de maître d’armes, ce qui lui procure quelque argent. Cette période de la vie d’Augereau reste très obscure. On ne connait pas très bien ses activités, tant dans l’armée prussienne que dans celle de Naples ; on ne sait que ce qu’il a bien voulu dire. Ce qui est certain, c’est qu’il fut chassé de Naples comme suspect. Auparavant, il s’était marié, sans le consentement des parents, avec une demoiselle Grach. Ils quittèrent l’Italie pour se rendre au Portugal où ils séjournèrent peu de temps et rentrèrent en France en 1790. C’est à partir de cette date que l’on peut suivre régulièrement la carrière d’Augereau. Il s’engage dans la garde nationale de Paris, puis il rentre dans l’armée à la Légion germanique où il obtient le grade d’adjudant-major. C’est en Vendée, à l’armée des côtes de la Rochelle qu’Augereau va montrer sa bravoure et ses talents militaires. Il est affecté ensuite à l’armée des Pyrénées-Orientales. C’est là qu’il connut le jeune Lannes, simple lieutenant, qu’il forma au métier des armes. Une amitié se noua entre eux qui ne s’éteignit qu’avec la mort de Lannes. Son jacobisme virulent vaudra à Augereau un avancement rapide : capitaine au 11° hussard le 26/06/1793, il est nommé six mois plus tard, le 26/12 général de division. Il a maintenant la réputation d’un général de valeur.

 

Soldat de la Révolution

Le mercenaire des armées des rois de Prusse et de Naples a fait son chemin. Toujours bellâtre, il affiche une coquetterie quelque peu exagérée dans sa tenue vestimentaire. Ses uniformes sont chamarrés ; de ses bottes à son chapeau, ce ne sont que dorures et broderies. Macdonald, dans ses Souvenirs, raconte une entrevue avec Augereau à l’armée d’Italie : “ son uniforme était éclatant ; il y avait des broderies jusqu’à ses bottes courtes ”. De son côté, Marmont, qui dénigre volontiers ses camarades, dit dans ses Mémoires : “ Sa mise était souvent celle d’un charlatan ”. Nommé commandant de l’avant-garde de l’armée des Pyrénées-Orientales, le 12/01/1794, il va prendre part à cette campagne d’Espagne qui marquera le départ de sa glorieuse carrière. Le 6/05/1794, il s’empare du pont de Céré et bat les espagnols. Nommé commandant de la 1° division, il est vainqueur à Saint-Laurent de la Mouga où il est blessé de plusieurs balles.

 

 

Campagne d’Italie

En septembre 1795, il est affecté à l’armée d’Italie : c’est là que ses talents militaires vont définitivement s’affirmer. Il combat avec succés à Montenotte, à Millésimo, à Lodi. Il se couvre de gloire à Castiglione, gagnant cette bataille en enfonçant le centre du Feld-maréchal autrichien Wurmser, qu’il rejette sur Mantoue le 5/08/1796. Dans son compte rendu au Directoire, Bonaparte,qui commande l’armée d’Italie, écrira : “ Augereau, beaucoup de caractère, de fermeté, d’activité ; à l’habitude de la guerre, est aimé du soldat ”. Continuant ses heureuses opérations, Augereau se signale à Arcole où il enlève le pont sous la mitraille ennemie. Pour le récompenser de cet exploit, Bonaparte lui confie l’honneur de porter à Paris, pour les remettre au Directoire, les 60 drapeaux pris à Mantoue. A son retour, il est nommé commandant du Veronais et du territoire de Venise. C’est dans ces fonctions honorifiques qu’il acquéra sa réputation de “ dépradateur intrépide ” ; par la suite, on parlera dans l’armée des “ fourgons d’Augereau ”, ces fourgons dans lesquels il entassait le produit de ses pillages. C’est aussi à Vérone qu’Augereau recevra la visite des parents de sa femme, qui avaient refusé le consentement à leur mariage. Avoir un gendre célèbre modifie parfois les préjugés ! Augereau magnanime, les traita fastueusement.


En juillet 1797, à la demande de Barras, Bonaparte l’envoie à Paris auprès du Directoire qui lui confie le commandement de la division militaire de Paris. Le Directoire, qui se sent menacé par la nouvelle majorité royaliste que les élections ont amenée au Conseil des Anciens et au Conseil des Cinq Cents, a besoin d’un général bon jacobin. C’est pour cette raison qu’il fait appel à Augereau qui sera le principal exécutant du coup d’Etat du 18 fructidor. Le choix est bon. Augereau est arrivé en annonçant : “ Je viens tuer les royalistes ”. Passant à l’action, il ne tue personne, mais fait cerner les Assemblées par les 33 000 soldats de sa division, et arrête les députés royalistes, dont Pichegru. Le Directoire le remercie de sa belle conduite en lui confiant le commandement des armées de Sambre-et-Meuse et de Rhin et Moselle. Outrepassant ses fonctions militaires, Augereau introduit la politique dans l’armée en y propageant son violent jacobinisme, ce qui inquiête les Directeurs.

 

Ceux-ci lui retirent son commandement et l’éloignent à Perpignan pour y commander la 10° division militaire. C’est là qu’il se fera élire, en 1799, député de la Haute-Garonne au conseil des Cinq Cents où il siègera à l’extrême gauche. Bien entendu, Augereau s’opposa au coup d’Etat du 18 Brumaire avec son habituelle violence de langage. Malgré cela, il se rallie finalement au Consulat. Bonaparte, lui donne alors le commandement en chef de l’armée française en Batavie. Après la suppression de cette armée, il reste deux ans, sans emploie, qu’il passe dans sa terre de la Houssaye. Il en est rappelé pour prendre le commandement du camp de Bayonne, le 29/08/1803, et, l’année suivante, celui de Brest.

 

En 1796, sous les ordres de Bonaparte, il s’illustre à la bataille de Montenotte et à la bataille de Millesimo puis lors de la prise du château de Cosseria, le 14 avril. Pendant la bataille du pont de Lodi, le 10 mai 1796, le mouvement tournant de ses troupes contribue à la victoire. Mais c’est surtout à Castiglione, le 5 août 1796, qu’il se couvre de gloire. La veille de la bataille, alors que l’armée française se trouve dans une position critique, il est le seul, en conseil de guerre, à préconiser l’attaque. Il est aussi présent, le 15 novembre, à Arcole, où il s’élance sur le pont à la tête de ses troupes.

Éloigné de l’armée, Augereau se livre à toutes les intrigues politiques dont Paris est le théâtre. Il participe ainsi au coup d’État du 18 fructidor (4 septembre 1797) qui écarte les conseillers suspectés de sympathies monarchistes. En remerciement, il est nommé commandant de l’armée de Sambre-et-Meuse, puis de l’armée du Rhin. Il se fait élire député de la Haute-Garonne au Conseil des Cinq-Cents où il siège à gauche. Jacobin, il manifeste son hostilité au coup d’État du 18 brumaire mais finit cependant par se rallier à Bonaparte qui lui confie le commandement de l’armée française en Batavie.

L’année suivante, il est remplacé par Victor, et reste sans emploi pendant assez longtemps. Il recommence alors ses attaques contre le gouvernement consulaire.Son ardeur républicaine finit par se calmer, lorsque Napoléon Ier, empereur, le nomme maréchal d’Empire, le 19 mai 1804, grand officier de la Légion d’honneur, duc de Castiglione et Grand-croix de l’ordre de Charles III d’Espagne.

 

Guerres napoléoniennes

Le maréchal Augereau prendra part à toutes les campagnes de l’Empire, sauf celle de Russie. Il commande la gauche de l’armée à Iéna et contribue à la victoire. A Eylau, malade, incapable de se tenir à cheval, il se fait attacher sur sa monture afin de pouvoir continuer à diriger ses troupes. Il se bat sous le feu des 60 canons de l’artillerie russe qui déversent une grèle de boulets sur son Corps d’armée ; la neige, fouettée par les vents, les flocons serrés aveuglent la troupe qui, de part sa direction, s’expose encore plus au feu de l’ennemi. Augereau, blessé au bras par une balle, doit abandonner son commandement, laissant ses divisions désemparées : elles seront presque entièrement décimées. Napoléon renvoie le maréchal en France pour y rétablir sa santé et soigner ses blessures.

 

Après son rétablissement, Augereau est désigné pour commander le 7° corps de l’armée d’Espagne. Peu après,il prend le commandement en chef de l’armée de Catalogne. Il ne fait rien de bien important en Espagne, si ce n’est la prise de Ripoll et la capitulation de Girone. Rappelé en France en 1810, il est nommé commandant du 11° corps de la Grande Armée en Allemagne. Pendant la campagne d’Allemagne, il sera vainqueur à Naumburg, le 9/10/1813. Ce n’est plus l’Augereau des campagnes d’Italie, ni celui d’Iéna et d’Eylau. S’adressant à lui, Napoléon lui dira ; “ Mon vieil Augereau, vous n’êtes plus l’Augereau de Castiglione ”. A quoi celui-ci répondit brutalement : “ Je serai l’Augereau de Castiglione quand vous me rendrez les soldats d’Italie ”. Il se bat encore avec fougue à Leipzig où, se jettant à la nage pour traverser l’Elster, il s’évanouit en prenant pied sur la rive.

 

En janvier 1814, Napoléon lui confie le commandement en chef de l’armée de l’Est et du Rhône, à Lyon, et lui écrit : “ Si vous êtes toujours l’Augereau de Castiglione, gardez le commandement ; si vos soixante ans pèsent sur vous, quittez le commandement et remettez-le au plus ancien de vos officiers généraux ”. Augereau ne réagit pas. Est-il aigri, las ? Est-ce l’âge ? Quoiqu’il en soit, il fait nettement preuve de mauvaise volonté. Son armée a pour mission de couper la ligne de communication de l’armée de Bohème en se dirigeant sur la Suisse. Cette manoeuvre peut décider de la victoire en séparant les armées ennemies. Augereau n’exécute pas les ordres de l’Empereur qui le presse de passer à l’action ; quand il le fera, il sera trop tard, et il devra faire faire demi-tour à ses troupes qui regagneront Lyon. Napoléon ne lui pardonnera pas cette faute qu’il considèrera, à juste titre, comme une trahison. Il la consignera dans son testament à l’article 6 : “ Les deux issues si malheureuses des invasions de la France, lorsqu’elle avait encore tant de ressources, sont dues aux trahisons de Marmont, Augereau, Talleyrand et de La Fayette. Je leur pardonne, puisse la postérité française leur pardonner comme moi ! ”. Cette lâcheté commise, Augereau se retire à Valence. Après l’abdication de Napoléon, il réunit ses troupes pour leur annoncer, dans une abjecte proclamation qui le couvrira d’ignominie devant l’histoire : “ Soldats ! Le Sénat, interprète de la volonté nationale lassée du joug tyrannique de Napoléon Buonaparte, a prononcé le 2 avril sa déchéance. Vous êtes déliés de vos serments : vous l’êtes par l’abdication même d’un homme qui, après avoir immolé des millions de victimes à sa cruelle ambition, n’a pas su mourir en soldat. Jurons donc fidélité à Louis XVIII On ne peut être plus vil.

 

Son ingratitude envers l’Empereur est odieuse ; il poussera la félonie jusqu’à s’entendre avec les autrichiens pour masser ses troupes sur la route que doit emprunter Napoléon pour se rendre à l’île d’Elbe, afin d’empécher une évasion possible. Le 26/04/1814, près de Valence, Napoléon, en route pour l’île d’Elbe, rencontre Augereau qui se dirige vers Paris. L’Empereur n’ignore pas, ou feint d’ignorer, la fameuse proclamation. Il aurait reproché à Augereau son comportement à Lyon ; celui-ci se serait disculpé tant bien que mal. Il existe plusieurs versions de cette rencontre. L’une dit qu’Augereau aurait manifesté le désir d’embrasser l’Empereur qui aurait accédé à ce souhait. Une autre version affirme que Napoléon, ne voulant pas en écouter d’avantage, mit fin à cet entretien en l’embrassant et qu’Augereau le laissa partir sans le saluer. Dans ses “ Souvenirs ”, Pons de l’Hérault raconte que Napoléon, descendant de sa voiture, s’avança vers Augereau qui portait une casquette et qui se contenta, en guise de salut, de porter la main à sa coiffure. Napoléon, très digne, ôta son chapeau et se comporta en souverain, ce qui mit le grossier maréchal dans l’embarras ; la conversation aurait duré une demi-heure. Arrivé à Paris, Augereau s’empresse d’aller faire sa soumission au Roi qui l’en récompense en le nommant pair de France, chevalier de l’Ordre de Saint-Louis et gouverneur de la 19° division militaire à Lyon.

 

Au moment du retour de l’île d’Elbe, Augereau se trouve en Normandie où il a été appelé au commandement de la 14° division à Caen, que va-t-il faire ? Certainement s’opposer à“ usurpateur ”, lui qui s’est soumis au Roi avec enthousiasme et qui avait adressé à ses troupes cette violente proclamation contre Napoléon, qu’il terminait en disant : “ Jurons donc fidélité à Louis XVIII ”. Ce serait mal connaître le versatile Augereau. Il va s’avilir une deuxième fois en faisant une nouvelle proclamation qui reflète bien la bassesse de son âme ; “ L’Emperteur ” est dans la capitale. Un moment le fortune lui fut infidèle ; mais ses droits imprescritibles, il les réclame aujourd’hui : jamais, ils ne furent plus sacrés pour nous… ”. Malgré ce volte-face, Augereau n’en fut pas moins rayé de la liste des maréchaux. Avec un manque total de dignité, il implore, il promet, prétend ne pas avoir trahi. Napoléon ne se laisse pas berner ; il n’est cependant pas rancunier, et la bravoure militaire l’a toujours impressionné : il réintégrera Augereau dans le maréchalat ; il aura même la faiblesse de lui accorder une opulente pension mais il ne lui donnera aucun commandement. Après Waterloo, au retour de Louis XVIII, le duc de Castiglione est mis en disponibilité et privé de tout traitement. Ayant conservé son titre de pair, il doit prendre part au procés du maréchal Ney : il refuse de siéger, répugnant à juger un frère d’armes. Là, Augereau montra une réelle dignité et manifesta cette solidarité dont il avait donné tant de preuves tout au long de sa carrière.Augereau ne survivra que six mois à Ney. Il est le premier des maréchaux à mourir de mort naturelle. Vieilli avant l’âge, miné par le chagrin de se sentir méprisé aussi bien par Napoléon que par Louis XVIII, qui lui a supprimé son traitement de maréchal, blessé dans son orgueil, rejeté par tous, son moral est durement atteint. Il ne pourra surmonter son mal : une hydropisie de poitrine. Il s’éteindra, à 59 ans, dans son château de la Houssaye, entouré de sa femme et de son beau-père.Augereau n’eut pas d’enfants.

 

Le nom du maréchal Augereau est inscrit au côté Sud de l’Arc de Triomphe de l’Etoile.

 

CAMPAGNES.
– Campagne d’Espagne, armée des Pyrénées (1794-1795).
– Campagne d’Allemagne (1806-1807).
– Campagne d’Espagne (1809).
– Campagne d’Allemagne (1813).

 

BLESSURES.
– Blessé de plusieurs balles à Saint-Laurent de la Mouga, le 13/08/1794 (Armée des Pyrénées).
– Blessé d’une balle au bras à Eylau, le O8/O2/1807.

 

Sabre Briquet